Le nez dans l’écorce et le compas dans l’œil !

Sans l’ombre d’un doute vous étiez présent(e) à la fête des ConfluenceS 2020 et vous vous souvenez que le thème de la journée reposait sur « l’Arbre ». Ne vous laissez pas méprendre, ce thème n’avait pas été choisi au hasard, puisque cette année l’équipe gestionnaire de la RNR Confluence Garonne Ariège a œuvré pour engager un suivi forestier national au cœur de la Réserve.

Parmi ses 579 hectares classés, la Réserve naturelle régionale Confluence Garonne-Ariège (RNR) n’est pas faite uniquement d’eau et de galets. Les berges et îlots de ces rivières, ainsi que les coteaux les surplombants, sont occupés par diverses mosaïques de végétation dont environ 110 hectares de forêts.

Afin de comprendre la dynamique de ces boisements pour une stratégie de gestion efficiente, l’équipe gestionnaire a souhaité disposer d’une base scientifique robuste, en diagnostiquant de nombreux facteurs descripteurs de « l’état de santé » de ces forêts. Elle s’est appuyée pour cela sur l’application du protocole PSDRF (Protocole de Suivi Dendrométrique des Réserves Forestières).

Quèsako « le Protocole PSDRF »

Ce protocole scientifique permet d’évaluer l’état de conservation initial des forêts étudiées et de mettre en place un suivi de leur dynamique dans le temps et dans l’espace. Partant du constat que la survie de plus de 20% des espèces animales et végétales forestières (européennes) est liée au volume, à la diversité et à la continuité du bois mort, le PSDRF s’intéresse autant à l’étude du bois vivant que du bois mort.

Le protocole est basé sur un système de points fixes placés en forêt et autour desquels, tous les 10 ans, des mesures sont réalisées sur les arbres. Ces points sont appelés des « placettes » puisque les relevés se font dans un rayon de 20 mètres autour du point fixe. De nombreuses mesures sont alors réalisées sur chaque arbre mort et vivant (debout et au sol) présent dans ce rayon : identification de l’essence, du diamètre, de la hauteur totale, de la hauteur de la première banche, de l’état sanitaire, de l’inclinaison, de la présence de cavités, de la présence de mousses, de lichens, de champignons, etc.

Outre des objectifs de conservation et de gestion, les données servent également à alimenter une base de données nationale permettant de faire de nos forêts, des forêts sentinelles face à des problématiques particulières comme le réchauffement climatique.

L’application du protocole PSDRF est coordonnée par l’équipe scientifique du Pôle Forêt de l’association Réserves Naturelles de France (RNF) que nous remercions ici pour leur accompagnement ainsi que pour leur implication dans l’analyse des données.

Un protocole qui s’approprie

Du fait de sa robustesse statistique pour acquérir un état de lieux réaliste face à des milieux naturels constamment dynamiques, l’application du protocole PSDRF est assez chronophage. Une des premières étapes est alors de définir une problématique précise pour orienter certains paramètres du protocole et diriger les analyses qui en découlent.

Localisation des placettes de suivi sur le boisement du Ramier de Lacroix-Falgarde

L’équipe gestionnaire de la RNR s’est attachée à appliquer le PSDRF suite au constat de l’incision des lits mineurs de la Garonne et de l’Ariège. Cette problématique prépondérante sur la Réserve correspond à un enfoncement des cours d’eau qui, dès lors, ne débordent plus aussi facilement qu’avant. Aujourd’hui, cette incision entraine une diminution des alimentations en eau des milieux naturels périphériques. Les boisements dits « humides », caractérisés par des essences d’arbres comme le Saule blanc (Salix alba), évoluent alors peu à peu vers des boisements « secs » avec l’apparition d’essences moins hygrophiles comme le Chêne pubescent (Quercus pubescens).

Sur la Réserve naturelle, le PSDRF a donc été orienté pour évaluer cette dynamique tout en concourant à un diagnostic global de l’état de conservation des boisements.

Bilan de fin d’année

  • 89 placettes ont été disposées et étudiées au sein des boisements de la Réserve naturelle. Ces placettes ont été matérialisées sur le terrain afin de pouvoir revenir tous les 10 ans aux même endroits et réaliser les relevés sur les mêmes arbres.
  • 3003 arbres ont été déterminés et étudiés pour évaluer leur morphologie, leur état sanitaire, et leur potentiel en DMH (DendroMicroHabitats, correspondant à des particularités morphologiques de l’arbre permettant de jouer des rôles dans le cycle de vie de certaines espèces de faune et de flore).
  • 1700 DMH déterminés sur les arbres inventoriés sur pieds. Cavités, branches cassées, fentes, écorces décollées, nids de vertébrés et d’invertébrés, tapis de mousses et lichens, etc.
  • 4131 plants de régénération ont été inventoriés et classés selon leur état de croissance.
  • 240 heures de relevés de terrain. Si la préparation du protocole aura pris environ 64 heures de travail, la phase de récolte de données aura été la plus conséquente avec 240 heures de relevés terrain.

Aujourd’hui ce travail n’est pas terminé puisqu’il reste encore à analyser les données et en tirer les conclusions nécessaires. Rendez-vous en décembre 2020 pour connaitre l’état de conservation et la dynamique des boisements de la RNR Confluence Garonne Ariège !