Un automne restaurateur pour les zones humides de la Réserve naturelle

L’automne, signant la fin des périodes de reproduction chez les animaux et la mise en repos des végétaux, est classiquement la saison privilégiée des chantiers et aménagements sur la Réserve naturelle. Cet automne 2025 est particulièrement riche en chantiers nature sur le territoire, en grande partie liée à des actions de restauration des zones humides. Rappelons que la Réserve naturelle comporte près de 300 hectares de ces espaces sensibles, essentiels pour la biodiversité (plantes aquatiques, poissons, amphibiens, libellules, etc.) et aux rôles centraux pour l’écosystème (réduction de l’impact des crues, tampon hydraulique, filtration de l’eau, etc.). Mais des chantiers en automne se préparent bien en amont : retour sur plus d’un an de construction de ces actions de restauration.

Des bras morts de Garonne essentiels au Brochet

Devenus rares sur l’axe Garonne-Ariège, qui plus est à proximité de Toulouse, les bras morts sont d’anciens bras des cours d’eau qui se referment, se comblent, et ne sont plus alimentés que lors des crues. Si celles-ci arrivent au printemps, elles permettent entre autres au Brochet de s’y reproduire, dans un espace riche en végétaux et à l’abri du courant. Mais en raison de la dynamique altérée des cours d’eau, de l’endiguement et des modifications des débits, ces bras morts sont de moins en moins connectés, leur entrée se bouche et les arbres les colonisent. Depuis plusieurs années, un retrait des embâcles et des actions de lutte contre les arbres exotiques envahissants sont mises en place, notamment avec des étudiants qui viennent prêter main forte à la Réserve naturelle.

Un suivi topographique (la profondeur du bras et la hauteur des berges) est réalisé tous les 5 ans sur les 6 bras morts surveillés, afin de mesurer le niveau de comblement des entrées. En 2025, un gros travail d’ouverture a été engagé sur le bras mort le plus prometteur, avec 50m2 terrassés manuellement à la pelle par des étudiants, pour retrouver – on l’espère – un passage suffisant pour que les poissons reproducteurs circulent. Résultats dans quelques années, lors de futurs inventaires piscicoles réalisés en partenariat avec la Fédération de Pêche de Haute-Garonne.

Une annexe hydraulique perchée à Portet-sur-Garonne

En zone périurbaine, de nombreux secteurs de la Réserve naturelle présentent un historique très anthropisé, avec des digues enterrées pour protéger d’anciens ports… ou les villes actuelles. Ailleurs, ce sont des remblais artificiels le long des cours d’eau qui subsistent encore. Sur Portet-sur-Garonne, une zone humide d’intérêt, mais perchée et coupée de la Garonne par un de ces merlons est surveillée et suivie depuis plusieurs années. Placée sous une ligne à haute tension, la fermeture de cette zone, isolée de la Garonne et colonisée par la végétation, impose un entretien régulier et la coupe des arbres sous la ligne. Une solution : faire rentrer de l’eau et favoriser la réhabilitation en zone humide avec une végétation spécifique, souvent herbacée à arbustive (de type roselière). Une action de restauration a donc eu lieu en début d’automne avec l’arasement du merlon à l’aide d’une pelle mécanique, pour favoriser le retour de l’eau lors des crues. Une modification des sentiers et de la gestion sur ce secteur est à prévoir, avec une connexion améliorée espérée dès 2026.

Le Ramier de Goyrans, un potentiel exceptionnel pour un site au passé chaotique

Espace de plusieurs dizaines d’hectares sous la falaise de Goyrans, le Ramier présente un historique varié : ancien espace agricole, remanié ensuite pour permettre l’activité d’un moulin à eau (l’ancien chenal et les vestiges du moulin sont encore visibles), la deuxième moitié du XXe siècle a vu ensuite arriver une gravière. Les pelles sont venues extraire le sédiment déposé sur cet ancien lit de l’Ariège, laissant le paysage rempli de « trous ». Depuis la fin de l’exploitation, la zone s’est revégétalisée naturellement, avec un espace boisé humide et de nombreux casiers de creusement… qui ont évolué vers des zones humides de substitution de fort intérêt écologique pour le secteur. En voie de dégradation (diminution des apports en eau de l’Ariège, comblement et enfrichement, développement de plantes exotiques), il a été décidé d’étudier la faisabilité de restaurer ce site. Le projet en plusieurs étapes est lancé à partir de 2024 : topographie et carte complète du secteur, modélisation hydraulique et diagnostic, réunions multiacteurs pour définir les options à retenir, demandes d’autorisations réglementaires et enfin travaux en 2025. L’objectif est double : faire rentrer de l’eau lors des crues (l’exploitation de granulats ayant isolé les zones humides de l’Ariège) avec un chenal principal d’accès, et permettre une meilleure connexion entre les zones humides, avec des surverses reprofilées entre elles. La modélisation hydraulique a permis de définir des cotes altimétriques précises pour permettre d’inonder tel ou tel secteur, en fonction des enjeux et de la fréquence des débits dans le cours d’eau. Les futurs mois et années seront ensuite dédiés aux suivis scientifiques sur site, pour mesurer l’impact positif espéré sur les zones humides et la biodiversité.

La Réserve naturelle, dont une majeure partie du linéaire est composé des cours d’eau Garonne et Ariège et de leurs zones humides attenantes, a une forte responsabilité concernant le maintien de ces milieux naturels. Avec le changement climatique en variable supplémentaire, les actions de restauration visent à redonner au milieu une capacité de résilience et un coup de pouce après parfois des décennies de dégradation anthropique. Ces actions sont autant d’exemples suivis de près pour mesurer l’évolution de ces écosystèmes, notamment dans le cadre de l’augmentation des températures et de la modification des débits des cours d’eau. L’ensemble de ces actions nécessitent l’apport d’un grand nombre de partenaires, des géomètres aux conducteurs de travaux, en passant par les bureaux d’étude hydrauliciens aux experts des services de l’Etat. Sans oublier les bénévoles et étudiants qui ont été nombreux à venir apporter leur pierre à l’édifice lors de chantiers participatifs.

L’ambition sur le terrain de ces actions de restauration a été rendu possible grâce au soutien du Fonds Nature 2050 porté par la MAIF dont Nature en Occitanie, gestionnaire de la Réserve naturelle, a été lauréat en 2024. Fonds auquel s’est associé l’Agence de l’eau, l’Etat, la Région Occitanie et le Département de la Haute-Garonne. Un grand merci à l’ensemble des partenaires, et rendez-vous prochainement pour mesurer, étudier et valoriser l’évolution de ces sites restaurés.