Pour sauver le Saumon atlantique, la Réserve naturelle Confluence Garonne-Ariège lance un élevage commercial
CECI EST BIEN UN POISSON D’AVRIL !
Le Saumon atlantique est un poisson emblématique de nos fleuves et de nos rivières mais aussi un symbole des espèces migratrices menacées en France et en Europe. Consciente de sa responsabilité pour la préservation d’un élément du patrimoine naturel, l’équipe de la Réserve naturelle lance un programme de réintroduction et de sauvegarde sur le territoire de la Confluence Garonne-Ariège à partir d’un élevage commercial.
Le Saumon atlantique (Salmo salar) est un poisson amphihalin ; son cycle de vie est partagé entre la mer et l’eau douce. Ce grand migrateur revient dans le cours d’eau où il est né et y meurt après s’être reproduit. De par ses exigences biologiques, les populations nationales et européennes de Saumon ont fortement régressé au cours du 19ème siècle et ont disparu de plusieurs bassins hydrographiques, dont celui de la Garonne, en lien avec la fragmentation (obstacles édifiés dans les cours d’eau) et la dégradation des milieux (pollutions, extraction de graviers, endiguement…). Le Saumon est classé Vulnérable en Europe et en France par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.
Après une prise de conscience nationale et la création du « Plan Saumon » en 1975, des actions de restauration ont été mises en œuvre, notamment sur le bassin de Garonne à la fin des années 1980, dont l’interdiction de pêche sur le bassin, la mise en place de dispositifs de franchissement des barrages, des opérations de repeuplement… L’effort de repeuplement réalisé sur le bassin Garonne-Dordogne représente en moyenne près d’un million de juvéniles par an (785 880 jeunes saumons déversés en 2022). Les populations sont toutefois fragiles et en cours de restauration. L’objectif final est de parvenir à une population sauvage autosuffisante.
Dans et autour de la Réserve naturelle, des frayères (sites de reproduction) pour le Saumon étaient connues et encore actives au début des années 2000, notamment près de Venerque sur l’Ariège, sur les communes de Roques et de Muret sur la Garonne en amont de la Réserve naturelle, et au niveau de la Confluence sur Pinsaguel et Portet-sur-Garonne. Ces secteurs sont aujourd’hui considérés comme des zones potentielles de fraie. D’autres potentialités sont également recensées près de Justaret, Goyrans et Clermont-le-Fort.
Fort de ce constat, l’équipe gestionnaire lance en 2024 un programme de réintroduction et de sauvegarde du Saumon atlantique sur la Réserve naturelle. Ce programme comprend des travaux de restauration des frayères potentielles et l’élevage de jeunes saumons dans la Réserve naturelle pour contribuer au repeuplement des bassins de Garonne et d’Ariège. Il s’intègre dans le Plan National 2022-2027 élaboré par l’Office Français de la Biodiversité en faveur des migrateurs amphihalins, dont fait partie le Saumon, et le Plan de Gestion des Poissons Migrateurs 2022-2027 Garonne-Dordogne-Charente-Seudre-Leyre, coordonné par la Préfecture de Région de la Nouvelle Aquitaine.
De manière expérimentale, en partenariat avec les acteurs et les experts de l’espèce, dont l’association MIGADO, il s’agira d’intégrer la filière de production de jeunes saumons. L’objectif est de produire 50 000 alevins par an à l’horizon 2026. Les deux tiers des individus produits seront déversés dans la rivière Ariège, entre Cintegabelle et Saint-Jean du Falga, et au niveau des frayères potentielles dans la Réserve naturelle. Le tiers restant sera valorisé de manière commerciale afin de financer le programme.
De manière pratique, les œufs produits par le centre de Bergerac en Dordogne, de souche sauvage Garonne-Dordogne, seront récupérés après embryonnement et éclosion dans la pisciculture de Pont Crouzet dans le Tarn pour grossissement dans d’anciennes gravières et plans d’eau situés dans la Réserve naturelle. Ces bassins seront aménagés à moindre frais, bénéficiant déjà de capacités naturelles. Des agents saisonniers seront recrutés pour assurer la surveillance, l’entretien des équipements et nourrir les poissons. Même si le circuit d’approvisionnement reste à stabiliser, plusieurs agriculteurs céréaliers des communes avoisinantes ont manifesté leur intérêt pour ce programme et proposent de fournir de la farine végétale pour l’alimentation des poissons.
D’un point de vue commercial, les saumons seront vendus sous le Label Bio ; les produits, principalement saumons entiers frais et filets en barquette, sont en cours de certification. Des contacts et des négociations ont d’ores et déjà été lancés avec des épiceries et des commerces spécialisés pour une distribution autour de Toulouse. Face à la concurrence, la Réserve naturelle fait en effet le pari du local et espère surfer sur les difficultés rencontrées par les différents acteurs mondiaux et notamment en Norvège, où des dizaines de millions de poissons sont morts en 2023 à la suite d’infections dans les élevages.
Prochainement, le Saumon de la Confluence servi dans les cantines scolaires comme dans les grandes tables toulousaines ? N’hésitez pas à soutenir cette nouvelle filière au lancement de la commercialisation, espérée à l’été 2024.