Dans le cadre de son programme technique et scientifique, Nature En Occitanie, en tant que gestionnaire de la Réserve Naturelle Régionale Confluence Garonne-Ariège, organise une 2ème journée technique et scientifique :
Jeudi 12 décembre 2024 de 9h à 17h
à l’occasion de la Journée Mondiale des Sols
Amphithéâtre Paul Sabatier de l’INP-ENSAT
à Auzeville-Tolosane
Télécharger le programme de la journée en PDF ici.
La thématique retenue, autour des « Sols », sujet d’intérêt majeur et pourtant méconnu et sous-questionné, portera sur leur protection, leur désartificialisation, les solutions et les recherches inspirées de retours d’expérience, en espace naturel comme en plein centre urbain.
Cette journée est à destination des élus et agents des collectivités, chercheurs, aménageurs, urbanistes, gestionnaires, associations de protection de la nature, etc.
Dix conférences se succèderont, comprenant une intervention de 20 minutes suivie de 10 minutes d’échange avec le public.
Objectifs de la journée :
- Faire une actualisation de l’état des connaissances sur les « sols » et souligner leur importance.
- Illustrer des leviers d’actions pour les protéger.
- Partager des expériences sur leur restauration.
Vous trouverez les résumés des interventions ci-dessous :
9h30 – Les sols de la région Occitanie et leurs spécificités – Maritxu GUIRESSE, INP AgroToulouse/CNRS
Une des plus vastes régions agricoles de France, l’Occitanie recèle une richesse de diversité pédologique qui s’explique, tout d’abord par sa géographie. Ses deux massifs montagneux, les Pyrénées et le massif Central, ont fournis des matériaux d’érosion contribuant à l’accumulation de sédiments, en aval, dans le bassin Aquitain donnant des sols relativement profonds. A ce patchwork de matériaux parentaux très divers, s’ajoutent des influences climatiques multiples : méditerranéenne, atlantique, mais aussi montagnarde. On retrouve en Occitanie la palette de quasi tous les types de sols que l’on retrouve en France métropolitaine. Distribués plutôt en toposéquences dans les territoires molassiques IIIaires où le relief est le résultat d’une intense érosion depuis des millénaires, les sols sont plutôt répartis en chronoséquences dans les grands couloirs alluviaux IVaires. La connaissance que nous avons actuellement de tous ces sols est thésaurisée dans une carte à l’échelle 1/250 000 et sa base de données associée. Il s’agit du Référentiel Régional Pédologique dont la carte est entièrement visible sur le géoportail de l’état français. La base de données associée, structurée selon le modèle DONESOL, comprend les caractéristiques des grands types de sols des pédopaysages. Cette base de données constitue un point de départ pour aller plus loin et permet des analyses complémentaires. Par exemple, un indice de multifonctionnalité potentielle des sols a été développé et a mis en évidence que la partie ouest de l’Occitanie a plus de potentialité agricole que la partie est, sans que l’on connaisse clairement l’impact qu’aura le changement climatique sur ces potentialités. Finalement, par ailleurs, notre région subit aussi les effets délétères de l’urbanisation, qui pourraient toucher malheureusement les meilleurs sols de notre région. Quoiqu’il en soit, il faut souligner la grande diversité de sols à préserver d’urgence en Occitanie.
10h – Liens entre les diversités des organismes du sol sous différents régimes hydriques dans des écosystèmes contrastés : implications pour le fonctionnement des écosystèmes – Axelle TORTOSA, CEFE-Univ Montpellier-CNRS-EPHE-IRD
La biodiversité du sol, incluant plantes, vers de terre, nématodes et micro-organismes, est essentielle au fonctionnement des écosystèmes et à l’atténuation du changement climatique ; elle nécessite une meilleure intégration dans les stratégies de conservation. Le projet BELOW explore comment les activités humaines et les variations de régime hydrique dans différents écosystèmes du Sud-Ouest de la France modifient les relations entre la diversité des organismes du sol et leurs effets sur des fonctions écosystémiques telles que les émissions de gaz à effet de serre, le stockage du carbone et le cycle des nutriments. Cinq groupes d’organismes (racines, vers de terre, nématodes, bactéries et champignons) ont été échantillonnés dans plusieurs écosystèmes : agroécosystèmes, forêt méditerranéenne, tourbière et ripisylve. Les relations entre les communautés et leur diversité spatiale ont été analysées en fonction des conditions d’humidité du sol (sec versus humide) dans chaque écosystème. Les résultats montrent que les communautés de bactéries et champignons covarient dans tous les écosystèmes, sauf dans les sols labourés, et que les écosystèmes semi-naturels présentent davantage de liens entre les groupes d’organismes. Le régime hydrique affecte la diversité de manière variable selon les groupes et les écosystèmes, par exemple, la sécheresse accroît la richesse taxonomique dans la ripisylve. Mais il affecte aussi significativement la composition des communautés, où ce sont majoritairement des processus de turnover qui sont en jeu. Ces résultats montrent l’importance de considérer les interactions entre biodiversité du sol et ressources en eau pour mieux anticiper les impacts sur le fonctionnement des écosystèmes et leur résilience.
10h30 – Contamination par les pesticides d’échantillons de sol et de fleurs prélevés dans des Réserves naturelles d’Occitanie – Petra ROUSSEL, POLLINIS
La France possède une riche mosaïque de Réserves Naturelles, abritant des écosystèmes diversifiés qui servent de sanctuaires à la biodiversité. Cependant, sous la surface de ce paysage immaculé se cache une menace silencieuse : l’omniprésence des pesticides. Alors que des études documentent déjà la contamination par les pesticides des espaces protégés européens, les connaissances sur la pollution des Réserves Naturelles françaises demeurent lacunaires. Reconnaissant l’urgence de cette situation, nous avons lancé un projet visant à effectuer des analyses chimiques des sols de surface et de plantes collectées dans diverses Réserves Naturelles de France. En incluant une diversité de Réserves, y compris des sites isolés, côtiers, urbains et agricoles, le projet assure une compréhension holistique des modèles de dispersion des pesticides et des implications écologiques en découlant. Durant la période juin-octobre 2024, nous avons collecté une centaine d’échantillons de sols et de plantes dans 14 Réserves Naturelles situées en Occitanie. Nous avons analysé ces échantillons pour détecter la présence de près de 700 pesticides et de leurs métabolites. Jusqu’à présent, l’analyse a révélé la présence de pesticides dans trois Réserves Naturelles, avec 19 molécules différentes détectées. En détectant et mesurant la présence de pesticides dans nos Réserves Naturelles, nous nous armons de connaissances essentielles pour concevoir des stratégies d’atténuation ciblées, préserver la biodiversité et sauvegarder la santé des écosystèmes et des communautés qui en dépendent.
11h30 – Fonctionnalité des sols et émissions de GES, retour de travaux menés sur la RNR Confluence Garonne-Ariège – José-Miguel SANCHEZ-PEREZ, CNRS
Les sols des zones humides se trouvent parmi les écosystèmes les plus riches en termes de biodiversité et les plus actifs vis-à-vis de l’activité bactérienne. Comme nous, les bactéries des sols se nourrissent de matière organique et respirent de l’oxygène. Dans les sols inondés, les bactéries sont souvent en manque d’oxygène. Pour cela, elles utilisent la molécule d’oxygène présente dans les nitrates pour pouvoir consommer le carbone des sols et se nourrir. Ce processus, que l’on appelle communément la respiration hétérotrophe, se produit essentiellement dans les sols pendant les périodes d’inondation. Lorsque cette respiration est « bonne », elle produit du diazote N2, et du dioxyde de carbone CO2. Ces deux molécules sont présentes respectivement à 79% et 0,03% dans l’air que nous respirons. Ce processus complet de respiration est possible grâce à des gênes capables d’accélérer la réaction. Ces gênes peuvent être perturbés lorsque le milieu est soumis à des perturbations comme des pollutions ponctuelles ou des effets dus à des sècheresses extrêmes. Ce phénomène s’appelle l’inhibition et quand cette dernière affecte les gênes ceci peut donner lieu à du protoxyde d’azote N2O, qui est un gaz à effet de serre 300 fois plus puissant et polluant que le dioxyde de carbone. Evaluer les émissions naturelles de diazote en milieu forestier naturel permet d’évaluer l’état de santé des sols des forêts naturelles et d’établir un bilan de la part de ses émissions sur le flux globaux de diazote et de protoxyde d’azote. Dans le cadre de deux projets respectivement financés par la Région et par l’Europe (BELOW et Alfawetlands) nous mesurons depuis 2 ans les gaz à effet de serre notamment ce N2O sur des sites de la Confluence, sites contrastés en termes d’humidité et de structure des sols et en conditions contrôlées de laboratoire pour mieux appréhender les processus associés à ces émissions et ainsi emmener des éléments concrets aux gestionnaires pour les restaurations à venir.
12h – Evaluation de la qualité des sols : l’outil Biofunctool – Alain BRAUMAN, UMR Eco&Sols Univ Montpellier-INRAE-CIRAD-IRD Institut Agro Montpellier
La récente directive européenne, (Soil Monitoring Law) définit la santé des sols comme la capacité des sols à fonctionner et à fournir des services écosystémiques. Cette vision fonctionnaliste de la santé des sols ne correspond pas à la littérature actuelle. La plupart des études et des bases de données sur la santé des sols se concentrent principalement sur les indicateurs de stock (C, N, biomasse microbienne, etc.) et n’intègrent pas les indicateurs des fonctions du sol. Apres un bref rappel historique de la notion de santé des sols, cette présentation insistera sur les biais réductionnistes des approches actuelles concernant la mesure de la santé/qualité des sols, et montrera la nécessité de requalifier de manière distincte la santé de la qualité des sols. Enfin sera exposé un outil de terrain intitulé Biofunctool® qui prend en compte la multifonctionnalité du sol. Cette méthode comprend neuf indicateurs de terrain peu coûteux, permettant l’évaluation de trois fonctions principales du sol : la dynamique du carbone, le cycle des nutriments et le maintien de la structure du sol.
14h – Capacité d’infiltration des eaux pluviales dans les sols et opérations de désimperméabilisation – Sandra BERANGER, BRGM
La gestion des eaux pluviales connait aujourd’hui un changement de paradigme, en privilégiant une gestion à la source, contribuant ainsi à la nature en ville, au bien-être en ville, à la lutte contre les îlots de chaleur urbains et à la préservation de la ressource par infiltration et abattement des pollutions véhiculées par les eaux pluviales. Afin de s’inscrire dans cette démarche, des cartes de zonage du sous-sol indiquant le niveau de susceptibilité à l’infiltration des eaux pluviales ont été réalisées à la demande de plusieurs métropoles françaises, dont Toulouse Métropole. Nécessitant le traitement et l’agrégation de nombreuses données, une méthodologie spécifique a été développée, testée et validée sur le territoire de la Métropole. Ces études constituent une action préparatoire à l’élaboration du schéma directeur de gestion des eaux pluviales et un préalable à une évaluation des potentiels de désimperméabilisation et à la réalisation d’un zonage pluvial sectorisé.
14h30 – Préservation des sols dans les projets d’aménagement urbain – Vincent AGUSTI, Association des professionnels de l’Urbanisme de Midi-Pyrénées
En surface, le sol fait l’objet de pressions d’usage croissantes, à toutes les échelles. Ces pressions augmentent le prix du foncier et incitent à la densification, alors que dans le même temps, nous devons augmenter les surfaces de contact entre le sol et l’air pour accueillir plus de végétation, infiltrer les eaux de pluie, permettre les échanges indispensables entre ces milieux. Son épaisseur joue un rôle écosystémique central pour la préservation de la ressource en eau, la pérennité du végétal, la limitation de la surchauffe en ville, le vivant en général. Du sol, viennent toutes les matières premières que nous utilisons. Au sol, reviennent tous les déchets que nous produisons. Animés par la conscience de la finitude des ressources, les urbanistes investissent le sujet du sol. Agir par et pour le sol mobilise des expertises techniques pointues, pour dépolluer des friches, évaluer un potentiel agronomique ou d’infiltration, fertiliser des terres d’excavation, favoriser le développement des champignons sur les racines des arbres. Mais c’est surtout une démarche profondément systémique. Car le sol est fait d’interactions permanentes avec son environnement, et porte nombre d’enjeux. Le titre de l’édition 2024 des Échanges Urbains, “Le sol majeur”, est révélateur de la position centrale du sol dans les projets d’aménagement et de renouvellement urbain. En choisissant ce titre, l’APUMP a souhaité s’inscrire dans un mouvement de sensibilisation et de pédagogie auprès des professionnels et des élus. A partir d’une sélection de projets présentés lors de cette édition, nous verrons comment les métiers de l’urbanisme embrassent différentes façons de prendre soin du sol, de la planification au détail d’aménagement d’espaces publics ou naturels.
15h – Le sol et la restauration écologique – applications techniques, problématiques rencontrées et perspectives de travail – Camille MULATERO, CBNPMP
Depuis les années 2000, le Conservatoire botanique national des Pyrénées et de Midi-Pyrénées accompagne des opérations de restaurations écologiques en favorisant l’utilisation d’espèces végétales sauvages et locales. De part la banque de graines qu’il peut contenir et les interactions sol-plantes qui s’y développent, le « sol » est pris en compte pour le retour et le maintien des végétations restaurées. La science du sol fait partie intégrante des réflexions autour de l’itinéraire de la restauration. Depuis quelques années, initié notamment par le programme RES’SOL mené par le CBN Alpin et Pyrénéen entre 2021 et 2023, le sol est peu à peu considéré comme un paramètre à restaurer, au même titre que la faune et la flore. Les Conservatoires botaniques nationaux expérimentent des outils de suivis et d’évaluation (caractéristiques physico-chimiques, faune du sol, cycles, mycorhizes,…), en testant différents protocoles existants. Cette nouvelle approche, plus fine, heurte les structures à un manque de connaissances approfondies de cette science et le manque d’outils de suivis-évaluation adaptés aux milieux naturels (hors agricole). Des exemples de restaurations de pelouses subalpines et de prairies naturelles permettront d’illustrer la relation science du sol – restauration écologique, les limites rencontrées, et d’ouvrir aux échanges.
16h – Régénération des sols pour atténuer les effets de l’agriculture dans un contexte de changement climatique – Jean-Pierre SARTHOU, INP AgroToulouse/CNRS-CRBE
Le changement climatique amplifie les impacts environnementaux de l’agriculture : érosion de la biodiversité, pollution par les pesticides, dégradations qualitatives et quantitatives des ressources en eau et des sols, pollution azotée (eau, air) et phosphatée (eau). Il impacte aussi négativement la productivité agricole. Rétroactivement, toutes ces dégradations amplifient le changement climatique, par exemple, concernant la productivité agricole en baisse du fait du changement climatique, en provoquant un usage accru des engrais azotés de synthèse (qui libèrent du N2O, puissant gaz à effet de serre) et l’expansion des terres agricoles. De nombreux travaux scientifiques prouvent que fonder les nouvelles pratiques agroécologiques sur les principes de conservation et surtout de régénération des sols ouvre des perspectives très encourageantes. Cela permet en effet non seulement de réduire les impacts environnementaux de l’agriculture sur l’environnement, mais aussi et surtout d’améliorer l’adaptation et la résistance des agroécosystèmes au dérèglement climatique, afin d’atténuer voire d’éviter l’effet d’emballement, par rétroactions positives, vers lequel nous conduisent les effets de ce dérèglement sur l’agriculture industrielle.
16h30 – Reconstruire la ville sur elle-même : RENOV’Friches, un outil pour requalifier durablement les friches urbaines dans le contexte du “Zéro Artificialisation Nette” ZAN – Sandra BERANGER, BRGM
La requalification de friches suscite un net regain d’intérêt à l’échelle française, encouragée par des politiques nationales (Zéro Artificialisation Nette – ZAN ; plan France Relance, etc.) et les préoccupations environnementales de la société. Afin de justifier et tracer les décisions prises dans les différentes étapes de la vie d’un projet de requalification, prenant en compte les enjeux sociaux, économiques, sanitaires et environnementaux, une méthodologie a été définie, accompagnée d’outils d’aide à la décision. Regroupés au sein de la plateforme web dénommée RENOV’Friches, libre d’accès, cette démarche projet ambitieuse assure une communication entre les différentes parties prenantes et permet de prendre des décisions au fil de l’avancement du projet de requalification, depuis les phases amont jusqu’à sa mise en œuvre opérationnelle, les réalisations et nouveaux usages, sur la base d’évaluations objectives, pondérées et durables. Testée par des collectivités volontaires, elle a vocation à s’enrichir de nouvelles fonctionnalités au fil de son utilisation et des besoins des utilisateurs.